Il n’est dès lors pas surprenant que dans un secteur où l’intervention du gouvernement est souvent perçue, à juste titre, comme intrusive et animée par des arrière-pensées, les professionnels des médias eux-mêmes et les observateurs du paysage médiatique camerounais considèrent deux développements majeurs des trois dernières années et demie comme salutaires. Le Conseil National de la Communication, qui est une entité appartenant à et dirigée par l’État, joue aujourd’hui le rôle d’organe de régulation des médias au Cameroun. Connu par le passé pour sa lourdeur administrative et son inaction, le Conseil s’est récemment intéressé de près à la question du comportement non professionnel au sein des cercles médiatiques. Il est crédité pour avoir apporté une plus grande ouverture et transparence dans son travail en publiant un document qui décrit clairement les procédures de réception des plaintes du public liées aux médias. Même si certains journalistes ne sont pas satisfaits des décisions visant à suspendre les organes de presse ou leurs employés qui ont eu un comportement contraire à l’éthique, on reconnaît que le travail du Conseil a conduit à une baisse du nombre d’affaires judiciaires intentées contre les médias, qui se sont terminées par le passé par des peines de prison. Le deuxième développement majeur était le Forum National de la Communication de 2012, qui est une autre initiative du gouvernement menée par le Ministère de la Communication. Ce forum, qui a été décrit comme ‘inclusif’, a formulé des recommandations, dont la majorité a reçu l’approbation totale des membres de la communauté des médias, qui ont permis d’aborder un certain nombre de questions essentielles pour le développement des médias. La proposition de créer un mécanisme d’autorégulation – comme c’est le cas dans la plupart des professions libérales telles que le droit et la médecine, ainsi que la création d’un Fonds privé de développement des médias sous la tutelle de l’État ont été considérées comme des initiatives susceptibles de contribuer de manière significative à l’émergence d’un paysage médiatique conforme à l’éthique et financièrement viable au Cameroun. Alors que la plupart des questions abordées au cours de la période à l’étude font partie de la réalité des médias du Cameroun depuis deux décennies, la sécurité et la sûreté ont pris une dimension toute nouvelle. Avec les attaques à répétition du groupe terroriste « Boko Haram » auxquelles doit faire face le pays sur sa frontière nord, et les nombreuses incursions à l’est liées au conflit en République centrafricaine, les médias sont confrontés à des problèmes de sécurité et de sûreté alors qu’ils naviguent dans un territoire journalistique relativement inconnu - la couverture des conflits. Ne possédant pas les connaissances de base professionnelles appropriées, les journalistes doivent faire face aux problèmes de sécurité tout en couvrant les situations de conflits armés. Comme si cela ne suffisait pas, le travail des journalistes est davantage compromis par les préoccupations de sécurité des agents de l’État. Les responsables de la sécurité sont soit trop désireux d’utiliser les journalistes pour obtenir des informations précieuses sur « l’ennemi », ou de les utiliser comme complices, pensant qu’ils ont pu être en contact avec une personne figurant sur leur liste des personnes à surveiller. De nombreux journalistes ont été interrogés à un moment ou à un autre. Felix Cyriaque Ebole 6 BAROMETRE DES MEDIAS AFRICAINS Cameroun 2014