SECTEUR 1 Le Code pénal continue à être utilisé pour traiter des infractions médiatiques telles que les faits diffamatoires et les délits de diffamation. Cependant, selon les panélistes, le nombre de procès en diffamation semble diminuer. Cette tendance baissière s’explique en partie par le rôle croissant du Conseil National de la Communication (CNC) dans la réception et le traitement des plaintes des médias. Le CNC affirme que son mandat se limite aux questions d’éthique journalistique et ne remplace pas les actions en justice. Une autre explication est l’exercice de la «tolérance administrative», c’est-à-dire l’idée que les autorités permettent que certaines infractions en matière de médias restent impunies afin de promouvoir la liberté de presse. Néanmoins, les panélistes ont fait valoir que chaque fois que cela convient aux pouvoirs publics, les lois pénales du pays en matière de diffamation peuvent toujours être utilisées pour faire taire les médias critiques. Le CNC s’est plus distingué par ses sanctions contre les journalistes que par toute action ayant abouti à des licenciements ou à des règlements à l’amiable. En 2016, cet organe a ordonné la fermeture du journal Aurore Plus pour avoir prétendument publié des articles et des accusations sans fondement contre l’ancien directeur général de Cameroon Airlines Corporation, Jean-Paul Sandjo. Prenant une mesure très controversée, il a également interdit au directeur de publication de ce journal, Michel Moussala, de pratiquer le journalisme. Au cours des trois dernières années, le CNC a adopté des dizaines de sanctions, dont la suspension de journalistes et de médias. Cet organe a été à la fois loué pour ses décisions audacieuses, y compris les sanctions contre des journalistes du diffuseur d’État, et accusé de servir de puissants intérêts. Les membres du CNC admettent qu’ils subissent d’énormes pressions de la part d’individus puissants pour sanctionner des journalistes mais ajoutent que le Conseil s’efforce de travailler en toute indépendance. Malgré un environnement apparemment hostile au journalisme, l’entrée dans la profession est illimitée. En vertu de la loi, est reconnu comme journaliste toute personne qui, sur la base de ses aptitudes à la recherche et au traitement de l’information, en tire le meilleur parti de ses revenus. Selon les panélistes, cette définition ouverte a entraîné un afflux de personnes non qualifiées et non diplômées dans cette profession. Même si l’idéal, c’est de faire en sorte que l’entrée dans la profession de journaliste ne soit pas soumise à des restrictions légales, les panélistes préconisent davantage de conditions légales concernant l’entrée dans la profession. À l’heure actuelle, l’entrée dans le journalisme «est tellement ouverte qu’elle pose problème», a déclaré un panéliste. L’institution d’une carte de presse attribuée par les pouvoirs publics visait initialement à extirper de cette profession la «mauvaise graine» ou les «charlatans». Cependant, la Commission de la carte de presse et ses travaux ont été très controversés. Cette commission a été critiquée pour avoir délivré des cartes aux personnes mêmes que la commission devait extirper de la profession. «La carte de presse [délivrée par les pouvoirs publics] n’a eu aucune incidence sur la pratique du journalisme». «La détention de la carte de presse n’est pas une preuve de crédibilité ni de professionnalisme», a déclaré un panéliste. 72 BAROMÈTRE DES MÉDIAS AFRICAINS CAMEROUN 2018